COLLECTIF EGALITE RETRAITE : « Contre la guerre des sexes sur les retraites »

Qui est le COLLECTIF EGALITE RETRAITE ?

Nous sommes environ une centaine de pères de famille, pour la plupart fonctionnaires, qui réclamons les mêmes droits à la retraite que les femmes sur les avantages familiaux pour la retraite.

Nous sommes réunis en collectif sans forme juridique, parfois avec nos épouses, et nous sommes défendus devant les tribunaux par Maître Bertrand MADIGNIER, un avocat lyonnais.

Que demandez-vous ?

Nous demandons les mêmes droits que les femmes sur deux dispositifs :

- La retraite anticipée comme parent de trois enfants ayant plus de quinze ans d’ancienneté, ce qui n’existe que dans le public.

- La majoration pour enfants sur les retraites dans le public et le privé.

Vous considérez que vous êtes victimes de discrimination ?

Oui. Dans le public, la retraite anticipée et la bonification pour enfants étaient réservées aux femmes jusqu’à la condamnation de la France en 2001 par la Cour de Justice de Luxembourg. Depuis 2003, ces dispositifs sont ouverts aux fonctionnaires qui ont interrompu leur activité pendant plus de deux mois, ce qui correspond au congé de maternité et exclut de fait tous les hommes. Or, le système de majoration pour enfants doit d’abord être conçu comme un avantage accordé aux couples qui font des enfants que comme un instrument de la guerre des sexes qui ne doit pas devenir une religion en matière de retraite.

J’ajoute que nous avons le cas de trois collègues femmes qui ont adopté des enfants sans congé légal ou qui ont élevé les enfants de leur conjoint ou dont le fils est décédé avant ses neuf ans en-dehors « des faits de guerre » prévus par la loi, et qui sont également « victimes collatérales » de cette discrimination à l’interruption d’activité.

Mais certains hommes ont pu prendre un congé parental ?

Oui mais c’est assez rare, et cette condition remonte même aux naissances antérieures à 1985 alors que le congé parental était réservé aux femmes. Rappelons que l’allocation de complément de salaire n’a été créée qu’en 1994, et qu’elle peut être améliorée.

De plus, pour la retraite anticipée, le père doit avoir pris trois congés parentaux pour chacun de ses trois enfants, soit au moins six mois sans traitement, alors qu’une femme répondra toujours à la condition d’interruption par le congé de maternité.

C’est ni plus ni moins une façon de contourner l’arrêt GRIESMAR !

D’ailleurs, la Cour de Justice de Luxembourg rappelle que l’Etat n’a pas à s’immiscer dans les choix personnels et familiaux pris par les individus dans le sens où c’est encore les couples qui décident et qui doivent pouvoir décider si c’est le père ou la mère qui prendra éventuellement un congé parental total ou à temps partiel.

La structure familiale où l’homme travaille et la femme reste au foyer pour élever les enfants est devenue quasiment marginale.

D’où proviennent ces différences ?

La retraite anticipée a été créée en 1924 pour libérer les places de travail occupées par les femmes pendant la Première Guerre Mondiale lorsque les hommes sont revenus du front.

Ce dispositif a été conservé jusque dans la réforme FILLON de 2003 pour être reformulé de façon apparemment neutre après la condamnation de Luxembourg pour la bonification pour enfants.

Mais comme les hommes continuaient à saisir les tribunaux en particulier dans les secteurs où les pouvoirs publics « dégraissaient le mammouth », le texte prévoyant « femmes fonctionnaires » a été modifié en 2004 / 2005 par « fonctionnaire qui a interrompu son activité pendant plus de deux mois dans le cadre de tel ou tel congé familial ».

Pour la bonification, l’avantage est de 2% par enfant, et cela peut atteindre près de 10% de la pension de retraite perçue en moins par les pères d’au moins trois enfants lorsqu’ils sont nés avant 2004.

Le système est différent pour les naissances postérieures à 2004, car il s’agit alors d’une majoration de trimestres et non d’une bonification sur le montant de la pension.

Et dans le privé ?

Dans le régime général, la majoration pour enfants est de huit trimestres par enfants réservée aux femmes.

Malgré la validation du Conseil Constitutionnel en 2003, la Cour de Cassation a déclaré les « MDA » du régime général discriminatoire en 2006 pour un père de famille qui avait élevé seul ses six enfants.

En 2009, la Cour de Cassation a confirmé qu’il s’agissait d’une discrimination pour un père de famille qui n’avait pas élevé seul ses enfants, ce qui a amené la loi du 24 décembre 2009.

Mais cette loi ne prévoit-elle pas un partage et une option des trimestres de majoration ?

Oui, mais uniquement pour les naissances postérieures à 2010, c’est-à-dire que sur les huit trimestres de majoration pour chaque enfant, quatre trimestres de majoration de naissance sont réservés aux mères, et les quatre autres trimestres de majoration d’éducation peuvent être attribués au père ou à la mère.

Les parents ont le choix et en cas de désaccord, c’est la caisse qui arbitre l’option.

Par contre, pour les naissances antérieures à 2010, les parents n’ont aucun choix. Seule la mère peut en bénéficier, sauf si le père prouve avoir élevé seul les enfants avant leurs quatre ans révolus.

Encore une fois, la loi est modifiée en apparence, mais elle remplace une discrimination directe par une discrimination indirecte.

Que disent les tribunaux ? Que dit l’Europe ?

Depuis la loi FILLON sur le public, le Conseil d’Etat et tous les tribunaux administratifs de France et de Navarre sont saisis de recours sur la discrimination indirecte, mais ils refusent de saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne qui a rendu l’arrêt GRIESMAR de 2001.

Notre avocat a alors engagé des recours spécifiques pour attaquer la jurisprudence du Conseil d’Etat, et ça a marché en 2010 avec un tribunal de La Réunion qui a enfin saisi cette Cour Européenne.

Maître MADIGNIER a plaidé en 2011 à Luxembourg, mais de manière incompréhensible, la Cour Européenne a été dessaisie en 2012 par la Cour Administrative d’Appel de BORDEAUX.

Tous ses clients se sont cotisés pour payer encore un nouveau recours au Conseil d’Etat qui n’a même pas examiné le pourvoi.

Selon notre avocat, ce blocage du mécanisme préjudiciel (c’est comme ça que cela s’appelle) devrait entraîner la condamnation de la France par une autre Cour Européenne : la Cour Européenne des Droits de l’Homme à STRASBOURG.

C’est complètement fou !...

D’autres recours sont en instance, et Maître MADIGNIER a obtenu de nouveau ce fameux « renvoi préjudiciel » à la Cour de Luxembourg par la Cour Administrative d’Appel de LYON, ce que nous attendions car, sinon, ce sera la condamnation de la France par celle de STRASBOURG.

D’ailleurs, la Cour des Droits de l’Homme de STRASBOURG a déjà condamné la France en 2010 pour un de nos collègues pour l’application rétroactive de la loi de 2004 sur sa retraite anticipée qu’il a fini par obtenir en 2010 avec cinq ans de retard !

Ça c’est dans le public, avec des arrêts de la Cour Européenne. Qu’en est-il dans le privé ? Que dit la Cour de Cassation ?

Pour les MDA du régime général, la Cour de Cassation ne s’est pas encore prononcée. Nous savons qu’il y a eu des jugements de rejet des Tribunaux des Affaires de Sécurité Sociale, mais un arrêt de la Cour d’Appel d’AGEN de fin 2010 a retenu la discrimination indirecte.

D’autres recours sont en instance, notamment à la Cour d’Appel de PARIS, mais les affaires sont fixées à 2015 !

Nous pensons que les pouvoirs publics ont parfaitement conscience de la discrimination indirecte choisie par le Gouvernement précédent, mais qu’ils cherchent seulement à gagner du temps sans régler le problème.

Et la loi du 9 novembre 2010 ? A-t-elle changé quelque chose ?

La réforme WOERTH de 2010 est venue assouplir le dispositif dans les retraites du public sous la pression de la Commission Européenne qui avait ouvert une procédure d’infraction depuis 2004 contre la France, justement pour discrimination indirecte pour la retraite anticipée et la bonification pour enfants dans le public et tous les régimes spéciaux (EDF, Banque de France, RATP etc…).

Du coup, la loi WOERTH a remplacé la condition d’interruption totale d’activité par une réduction d’activité, c’est-à-dire le congé parental à temps partiel jusqu’à 70%, mais cela signifie que je devrais avoir pris un congé parental total ou partiel pour chacun de mes trois enfants, alors que ma femme a pu partir à la retraite depuis deux ans déjà, juste avec ses congés maternité.

C’est également un leurre démontré par les statistiques officielles qui montrent que les hommes représentaient 2% des temps partiels dans les années 80, 3% dans les années 90 pour arriver à 6% de nos jours.

Par contre, la retraite anticipée appartient désormais au passé, car les pensionnés sont désormais frappés par la décote depuis 2011 avec la loi WOERTH.

Si je comprends bien, vous demandez à bénéficier des mêmes droits que les femmes, alors que de nombreux rapports mettent en avant le fait que leurs pensions sont d’au moins 40% inférieures à celles des hommes. Ne trouvez-vous pas votre position exagérée ?

Je ne suis pas responsable de la discrimination subie par les femmes pour leur salaire. Cet écart de rémunération est vrai dans le privé, mais totalement faux dans le public : prenez une carrière d’enseignant, d’infirmier ou d’infirmière, de médecin où les femmes sont de plus en plus nombreuses : il n’y a aucun écart de rémunération, et le congé maternité est intégralement payé et cotisé comme s’il était travaillé dans le public (et dans le privé depuis 2010 seulement !).

Là encore, les statistiques du ministère aux droits des femmes montrent que les seuls écarts de salaires dans le public résultent des postes occupés, comme par exemple les cadres hospitaliers où les infirmières-chef sont plus souvent des femmes alors que les médecins sont plus souvent des hommes.

Tous ces rapports que vous évoquez montrent que cet écart diminue, et que la faiblesse des pensions des femmes par rapport aux hommes sont d’abord le résultat d’une différence de salaire, et donc de carrière où l’on doit distinguer la réalité du secteur public avec le secteur privé.

Pour les naissances antérieures à 2004 dans le secteur public, une femme bénéficiera des mêmes bonifications qu’un homme qui aura pris un congé parental pour la naissance de ses trois enfants, soit jusqu’à neuf années non cotisées par ce père de famille.

Dans le privé, Maître MADIGNIER défend un père de famille qui a perdu sa femme d’un cancer. Ce veuf n’a droit à rien alors qu’il a élevé seul leurs deux enfants après la maladie et le décès de leur mère intervenus après leurs quatre ans révolus.

Il ne peut même pas récupérer les MDA qui sont perdues pour sa femme.

Quant à l’écart des pensions dans le public entre hommes et femmes, il est beaucoup moins important, et le fait de réserver la retraite anticipée aux seules mères de famille vient encore aggraver cet écart.

Donc vous estimez que vous êtes victimes d’une injustice ?

Bien entendu ! Je me suis énormément consacré à l’éducation de mes enfants. L’exemple d’un de nos collègues à FRANCE TELECOM est intéressant : il s’est occupé seul de ses trois enfants dont il a eu la garde après son divorce, mais c’est son ex-femme qui récupère les bonifications uniquement parce qu’elle a accouché, alors que ce temps est validé pour la retraite, qu’elle n’a pas pris de congé parental et qu’elle a fait une carrière normale dans le privé. C’est scandaleux !

Cela ne compense pas les injustices qui résultent du marché du travail ou du temps partiel subis car ni la réforme FILLON ni la réforme WOERTH ne se sont attaquées aux conséquences du temps partiel sur les retraites.

C’est écrit dans les débats parlementaires de 2003.

Notre régime français de retraite par répartition est essentiellement fondé sur le nombre d’années de cotisation et les années de référence prises pour le calcul de la pension qui nous sera versée jusqu’à la fin de notre vie. Même si nos pensions risquent de diminuer, leur mode de calcul doit être le moins injuste possible

La HALDE préconise sur ce sujet de retenir les 150 meilleurs trimestres au lieu des 25 meilleures années pour remédier à la discrimination subie par les femmes essentiellement à cause de la mauvaise prise en compte du temps partiel pour le calcul de la pension de retraite.



Aujourd’hui, il existe la possibilité de racheter la différence de cotisations entre le temps partiel effectué et le temps complet qui reste la seule base de calcul, mais le prix est prohibitif. Par exemple un temps partiel de 80 % entraîne 12,78 % de sur-cotisation, ce qui représente 255€/mois de sur-cotisation sur son salaire pour racheter cette différence de temps partiel. Homme ou femme, le rattrapage du temps partiel pour la retraite est inabordable comme le rachat d’études, ce qui pénalise les travailleurs à temps partiels dans une proportion qui serait sans doute sanctionnée par la Cour de Luxembourg.

A quoi pensent nos dirigeants pour ces travailleuses ?

Vous êtes donc d’accord avec l’opinion selon laquelle les femmes sont encore pénalisées pour leur retraite ?

Oui, mais les gouvernements successifs ne font que compenser une discrimination subie par les femmes sur le marché du travail par une discrimination directe à la retraite, et cette discrimination directe est désormais substituée de manière très hypocrite par une discrimination indirecte qui ne dit pas son nom, et sans s’attaquer vraiment aux règles de calcul qui leur sont encore défavorables.

Pourtant, la France n’est pas un si mauvais élève européen en ce qui concerne l’accès au travail pour les femmes. Les horaires des écoles et l’offre de crèches pour la petite enfance a permis aux françaises bien plus largement qu’aux allemandes d’accéder au marché du travail.

Elles réussissent mieux dans les études et l’évolution des mentalités a fait reculer la discrimination à l’embauche pour les postes à responsabilité et l’écart des salaires qui se réduisent de plus en plus.

Nous, on n’est pas dans la guerre de sexes, car nos épouses sont également impactées par une pension de retraite sans majoration, en particulier lorsque les épouses elles-mêmes ont très peu travaillé pour élever les enfants, et ne toucheront que le minimum retraite. Et notre pension de conjoint sera réduite d’autant pour leur pension de réversion…

Si nous étions dans un régime par capitalisation, les pensions des hommes pourraient être favorisées par les données actuarielles qui permettent de majorer les pensions des hommes dont l’espérance de vie est inférieure à celle des femmes, car les règles européennes l’autorise ce qui est le cas dans certains pays européens. Ce n’est pas le cas en France, car les règles de calcul sont identiques quel que soit le sexe du pensionné et son espérance de vie, même si l’on sait que les hommes en profiteront moins longtemps.

Qu’allez-vous dire au nouveau Gouvernement qui prépare une nouvelle réforme des retraites, dont l’un des objectifs affichés est précisément de renforcer les droits à la retraite des femmes ?

Nous allons leur dire qu’il faut cesser l’hypocrisie et de contourner les problèmes.

Judiciairement, notre avocat rappelle le principe de « prohibition des compensations tardives » qui s’applique aux bonifications des fonctionnaires selon l’arrêt GRIESMAR de la Cour de Luxembourg de 2001 qui stipule que « la bonification du régime des fonctionnaires français se contente de compenser la faiblesse des pensions des femmes au moment de la retraite sans chercher à porter remède aux problèmes qu’elles rencontrent pendant leur vie professionnelle pour mener leur carrière sur un pied d’égalité avec les hommes », je vous cite de mémoire.

Cela signifie que la compensation uniquement au moment de la retraite est interdite, directement ou indirectement.

Dans l’affaire AMEDEE plaidée en 2011 par Maître MADIGNIER et radiée en 2012, l’avocat général, Monsieur JAASKINEN, n’était pas favorable à la thèse que nous défendons avec les époux AMEDEE et proposait un renvoi devant la Grande Chambre pour un revirement de jurisprudence alors que la Cour avait déjà confirmé sa jurisprudence GRIESMAR dans deux arrêts postérieurs concernant l’Italie et la Grèce, et scellée dans le marbre par la directive de refonte prise en 2006.

De son côté, le COR (Conseil d’Orientation des Retraites) a déjà préconisé la mise à plat des avantages familiaux qui se sont empilés de manière incohérente, et les lois adoptées entre 2003 et 2010 n’ont rien réglé.

Des situations nouvelles sont apparues sans être réellement appréhendées par le système de retraite, comme le divorce où les familles dites recomposées : la prestation compensatoire éventuellement prononcée lors d’un divorce s’avère totalement inopérante lorsque l’épouse qui n’a pas travaillé arrive à l’âge de la retraite quasiment sans aucun droit autre que le minimum retraite. Des mères (et parfois des pères) isolées devront élever seules les enfants souvent au détriment de leurs carrières pendant que des pères élèveront des enfants qui ne sont pas les leurs.

Depuis 20 ans, les lois n’ont fait que réagir dans l’urgence aux condamnations de la Cour de Justice de Luxembourg ou de la Cour de Cassation pour remplacer une discrimination directe par une discrimination indirecte.

Le résultat, c’est qu’en ne changeant rien au fond, nos gouvernements expose la France à de nouvelles condamnations qui auront deux conséquences : dans l’immédiat, cela coûtera très cher aux contribuables et à notre régime par répartition puisque tous les hommes pourront bénéficier des mêmes droits à majoration pour enfants.

Puis dans un deuxième temps, le gouvernement fera comme en 2003 en menaçant de supprimer ces majorations pour enfants, mais finalement, ils seront obligés de se mettre autour d’une table avec les partenaires sociaux, et c’est exactement ce que nous demandons : invitez-nous à cette table et discutons !

Connaissez-vous le contenu du projet en préparation ?

Non, justement nous serions curieux de savoir ce que nous préparent les « experts » réunis en commission constituée par le gouvernement.

Mais les observateurs attentifs ont fait remarquer que c’est la pression exercée par la Commission Européenne lors de la loi WOERTH de 2010 à cause de la procédure d’infraction ouverte sur les discriminations indirectes subie par les hommes que la loi a introduit des sanctions financières aux entreprises qui n’auront pas conclu un accord sur l’égalité salariale.

C’est quand même curieux, car que vient faire l’égalité salariale Femmes-Hommes au milieu d’une réforme des retraites, si ce n’est de chercher à rattraper le retard pris par la France malgré la transposition d’une directive sur l’égalité Femmes-Hommes au travail en 2008 ?!

En réalité, les Gouvernements successifs n’ont rien fait de concret pour chercher à lutter contre la discrimination subie par les femmes encore aujourd’hui, en tout cas dans le secteur privé, car la transposition de la directive européenne sur l’égalité en 2008 n’a eu que des effets incantatoires sans aucun moyen de contrôle pour sa mise en œuvre.

Nous, nous en avons assez de payer les pots cassés et qu’on nous reproche d’avoir bossé pour faire vivre notre famille en faisant tout pour nous impliquer pour l’éducation de nos enfants en plus du travail, à une époque où il était très mal vu de prendre même une petite disponibilité pour un enfant malade, ou comme un collègue qui s’est vu refuser par son chef de service une absence prolongée qu’il demandait pour son fils atteint d’une leucémie !

Et que disent vos interlocuteurs des Ministères ?

Rien, car nous n’avons toujours pas été reçus, et c’est bien ce qui nous scandalise.

Nous avons tous écrit une lettre ouverte au Président de la République après son élection pendant l’été 2012.

Il nous a renvoyé par écrit sur ses Ministres à qui notre avocat a écrit, soit pas moins de cinq Ministères.

Après plusieurs relances, Madame LEBRANCHU pour la fonction publique nous a répondu qu’elle n’avait « pas le temps de nous recevoir » (sic !).

Monsieur SAPIN nous a renvoyé sur Marisol TOURAINE qui n’a jamais répondu, tout comme Madame VALLAUD-BELKACEM pour le Ministère au Droit des Femmes.

Monsieur MOSCOVICI nous a renvoyé sur Monsieur CAHUZAC qui n’a jamais répondu, tout comme le Premier Ministre à qui nous avons demandé quel serait le Ministère compétent.

Notre collectif a écrit aux députés et sénateurs de leurs circonscriptions. Certains ont relayé notre cause par des questions écrites, ce qui a donné lieu à une réponse de Madame LEBRANCHU quasiment identique à celle de Monsieur WOERTH selon laquelle il n’y avait aucune discrimination puisque les dispositifs étaient ouverts aussi bien aux hommes qu’aux femmes, et que cela aurait été « amélioré » par la réforme de 2010.

On se demande s’il ne faudra pas monter sur les grues pour se faire entendre ?!

Nous avons eu quand même un contact avec des députés qui ont compris que le système était injuste, discriminatoire et même rétroactif puisque les lois sont appliquées aux naissances antérieures, et qu’elles ont même été opposées à des demandes d’admission à la retraite qui étaient déjà en cours avant le vote de la loi.

On se marche sur la tête !

Si la France est encore condamnée par une instance européenne, cela fera comme le harcèlement sexuel avec la décision du Conseil Constitutionnel qui a annulé toutes les procédures rétroactivement.

Mais le résultat sera inverse : on dira encore que ce sont les hommes qui ont gagné, alors que nous demandons à sortir de cette guerre de sexes. C’est un clivage complètement artificiel mais entretenu par un Gouvernement de droite, et maintenant de gauche.

C’est désespérant ou c’est de l’incompétence.

Quelles sont vos demandes ?

Oui, même si nous ne sommes pas des spécialistes ou des experts en retraite.

Pour la retraite anticipée, nous sommes conscients qu’elle est complètement anachronique et qu’elle va à contre-courant de l’allongement de la durée de cotisation ou de l’âge de la retraite à cause de l’équilibre de notre régime de répartition. Elle n’a plus qu’un intérêt théorique depuis que la décote s’applique en 2011

Le texte l’a maintenu encore pour les fonctionnaires qui réunissent les conditions d’ancienneté de quinze ans et d’avoir élevé au moins trois enfants pendant au moins neuf ans, donc nous demandons la suppression de la condition d’interruption ou de réduction d’activité.

Et pour les fonctionnaires qui ont engagé le recours, nous demandons une admission à la retraite rapide et sans décote conformément aux délais qui étaient posés par la loi du 9 novembre 2010, même si leurs recours a déjà été rejeté en première instance ou définitivement.

Nous souhaitons aussi que le texte supprime la condition « d’enfants vivants ou décédés par fait de guerre » en supprimant l’expression « par fait de guerre » afin de permettre à notre collègue mère de famille d’en bénéficier malgré la mort de son fils à l’âge de six ans dans un accident de trajet.

Pour la bonification du public, c’est-à-dire les fonctionnaires et les régimes spéciaux, nous demandons pour l’avenir la mise à plat des divers avantages familiaux notamment sur la base des travaux du COR et de la HALDE avec suppression de la discrimination indirecte résultant de la condition d’interruption ou de réduction d’activité.

Et pour la majoration du secteur privé, nous demandons la suppression de la différence de traitement entre les naissances antérieures ou postérieures à 2010 pour que tous les couples bénéficient du principe d’option.

Avez-vous des propositions concrètes ?

Nous avons deux pistes de réflexions et de propositions :

Pour les naissances antérieures à 2004, nous proposons la liberté d’option laissée aux parents qui peuvent choisir entre l’attribution totale sur la pension de l’un ou de l’autre, ou le partage par moitié d’un commun accord ou arbitré par les caisses de retraite selon des critères éducatifs et de sacrifice de carrière, en particulier en cas de divorce ou de séparation.

Mais nous sommes ouverts à la possibilité de convertir la bonification de pension, donc un bonus ajouté à la pension de retraite, au profit d’une majoration de trimestres comme c’est le cas pour les naissances postérieures à 2004 avec : validation des périodes d’interruption totale ou partielle pour les congés parentaux ou disponibilités familiales sans surcotisation, étant précisé que dans ce cas la validation est en général plus intéressante que la majoration de trimestres, mais cela reste un choix exercé par le futur pensionné qui n’est bien entendu pas cumulable.

Pour le régime général, nous proposons l’extension du principe de partage et d’option prévu pour les naissances postérieures à 2010 sans la condition d’ « éducation solitaire ».

Mais comme nous ignorons comment sera appliquée la règle d’option laissée aux parents pour les naissances postérieures à 2010 lorsque les parents sont pensionnés dans des régimes différents : l’un dans le secteur public et l’autre dans le secteur privé (car il existe un article R.173-14 du Code de la Sécurité Sociale qui prévoit dans un tel cas de divergence que seront retenues les règles applicables au régime de la mère). Ici, nous n’avons pas encore de position arrêtée.

Ces dispositifs doivent être revus et corrigés dans une cohérence d’ensemble avec une approche moderne et actuelle : difficultés de l’ensemble des régimes de retraite au moins jusqu’en 2040 notamment du fait de la génération des « papy-boomers » et du déséquilibre démographique aggravé par le chômage.

Votre mot de la fin ?

Nous sommes pour la défense des droits des Femmes et des Hommes sans discriminations directe ou indirecte. Ceux qui nous font passer pour d’horribles hommes niant les réalités sociales encore actuelles versent dans la caricature et les faux procès.

Nous avons déjà pris contact avec la plupart des syndicats, et même avec le Laboratoire de l’Egalité qui était monté au créneau pour la retraite des femmes en 2010.

Nous attendons encore leur réponse, mais surtout nous attendons d’être reçus par le Ministère chargé de la prochaine réforme des retraites, et intégrer un groupe de travail spécifique sur la problématique femmes-hommes piloté par le Ministère de Madame VALLAUD-BELKACEM.

Après, chacun prendra ses responsabilités.