COMMUNIQUE DE PRESSE n°4 du COLLECTIF EGALITE RETRAITE (C.E.R.) Lyon, le 18.07.2014

CONDAMNATION DE LA FRANCE PAR LA COUR DE JUSTICE EUROPEENNE pour discrimination indirecte contre les pères fonctionnaires sur leur retraite par un arrêt prononcé le 17 juillet 2014 à Luxembourg (Affaire LEONE C-173/13).

Après dix ans de combat judiciaire acharné depuis la réforme des retraites du 21 août 2003, les pères de famille fonctionnaires viennent d’obtenir gain de cause devant la Cour Européenne de l’Union Européenne qui déclare les dispositifs de RETRAITE ANTICIPEE pour les pères d’au moins trois enfants et de BONIFICATION POUR ENFANTS pour tous les pères fonctionnaires.

Réunis en Collectif avec leurs épouses voire quelques mères de famille adoptives victimes collatérales de la réforme « Fillon » de 2003, le COLLECTIF EGALITE RETRAITE avait déjà publié plusieurs communiqués de presse et tribunes libres sur leur tentative de faire reconnaître la discrimination indirecte qu’ils subissaient depuis 2003 sur ces avantages familiaux pour leurs droits à la retraite (voir notamment : http://www.lyoncapitale.fr/Journal/France-monde/Actualite/Societe/Retraites-des-peres-contre-la-discrimination-sexuelle.)

L’avocat lyonnais Maître Bertrand MADIGNIER avait obtenu pour deux de ses clients que la Cour de Justice soit saisie d’une question préjudicielle en 2010 puis en 2013, malgré le blocage du Conseil d’Etat qui avait assis sa jurisprudence dès 2004 par un arrêt D’AMATO.

Il est vrai que les spécialistes avaient fustigé les choix législatifs qui consistaient à ne rien changer sauf la forme, c’est-à-dire que l’expression « femme fonctionnaire » était remplacé par « fonctionnaire ayant interrompu son activité pendant au moins deux mois lors de la naissance de son/ses enfant(s) », ce qui constituait par une apparente neutralité une discrimination indirecte reconnue par la H.A.L.D.E. dès 2005.

Mais alors que la Cour de Européenne de Luxembourg avait déjà sanctionné la France en 2001 pour les mêmes avantages familiaux de retraite en raison d’une discrimination directe par deux arrêts GRIESMAR et MOUFLIN, c’est donc avec un décalage de dix ans que la Cour de Luxembourg vient de reconnaître que la France a violé le principe d’Egalité des sexes cette fois-ci par une discrimination indirecte.

Les intéressés avaient vainement fait valoir leur carrière tout aussi accidentée que celle des femmes, ou l’éducation des enfants après leur divorce, mais chaque fois, les tribunaux appliquaient la jurisprudence du Conseil d’Etat sans état d’âme. Leur cause jugée « politiquement incorrecte » avait amené les requérants et leur avocat à invoquer la « suspicion légitime » pour tenter de récuser les juges qui refusaient de saisir la Cour de Luxembourg à la place du Conseil d’Etat.

C’est dans ce contexte « tendu » de recours collectifs que la Cour Administrative d’Appel de LYON avait finalement ordonné ce renvoi préjudiciel par un arrêt pris en chambres réunies le 3 avril 2013 sur l’affaire des Epoux LEONE qui ont demandé l’indemnisation de leurs préjudices résultant de la violation du Traité de l’Union par la loi mais aussi par le Conseil d’Etat lui-même.

Une première affaire préjudicielle « AMEDEE » avait été ouverte à la Cour de Luxembourg en 2010 à la Cour mais retirée en 2012 en exécution d’une décision de la Cour Administrative d’Appel de BORDEAUX particulièrement zélée puisqu’elle n’avait pas motivé son arrêt et rejeté une série de près d’une cinquantaine de procédures similaires.

Sur le terrain politique, le C.O.R. (Conseil d’Orientation des Retraites) mais aussi divers rapports parlementaires et celui de la Commission MOREAU avait préconisé de réformer tous les droits familiaux à la retraite en raison de leur compilation incohérente et reposant sur une vision nataliste des années 50 devenue archaïque voire contre-productive, mais que la réforme TOURAINE du 20 janvier 2014 avait maintenu pour ne pas aggraver la faiblesse des retraites des femmes.

Pourtant, le COLLECTIF EGALITE RETRAITE avait tenté d’infléchir les travaux des parlementaires par une approche plus moderne et moins « clivée sexuellement » et cherché à convaincre les ministres chargés de ce dossier en résumant leurs arguments par le slogan : « Contre la guerre des sexes » (voir le site du Collectif : http://egalite.blog.free.fr/index.php), mais peine perdue : ils n’ont même pas été reçus par aucun ministère dont celui de Marylise Lebranchu qui leur a répondu « qu’elle n’avait pas le temps ».

Cette condamnation de la France va avoir des conséquences funestes sur le financement des retraites du secteur public mais aussi sur toute la problématique des droits familiaux pour la retraite que le C.E.R. a vainement tenté d’éviter :

1/ Si les 150 clients de cet avocat lyonnais ne pèsent pas très lourd financièrement après le succès de leurs procédures, tous les nouveaux retraités fonctionnaires admis depuis un an à la retraite vont pouvoir demander la BONIFICATION POUR ENFANTS qui alourdira la facture d’environ 10% jusqu’à leur décès et au-delà par la pension de réversion pour leur veuve, soit un surcoût de plusieurs millions d’Euros.

2/ La système retenu en 2009 pour les « M.D.A. » du secteur privé (Majorations d’Assurance après deux arrêts de la Cour de Cassation ayant retenu la discrimination sur le sexe) risque lui-aussi de connaître le même sort, même si le régime général de la CNAV reste pour la plupart soumis à une autre directive 79/7 de 1978 : En effet, la récente réforme qui réserve l’option des 4 trimestres de majoration-Education sur les 8 accordés aux mères pour toutes les naissances antérieures à 2010 pourrait bien faire l’objet d’une nouvelle procédure d’infraction de la commission européenne ou d’une nouvelle condamnation par la Cour de Luxembourg dans le cadre de procédures actuellement en cours.

3/ Les projets de réforme des droits familiaux telle que la Commission MOREAU avait pu l’imaginer ne pourront pas retenir cet artifice de la condition d’interruption d’activité qui réserve aux femmes ces avantages du fait de leur seule maternité. C’est ainsi que la proposition de fusion des M.D.A. avec l’A.V.P.F (Allocation Vieillesse pour Parents au Foyer versée par la CAF) devra être remis à l’ouvrage dans un sens plus respectueux de l’égalité réelle en passant par une harmonisation entre Avantage accordé dans le public (Bonification désormais au bénéfice des pères et mères) et le privé (M.D.A. en pratique encore réservées aux femmes) puisque l’idée de la réforme de 2009 est d’attribuer tout ou partie des MDA au père ou à la mère, mais pas aux deux parents.

Pour le COLLECTIF EGALITE RETRAITE, l’Egalité n’a pas de sexe et ne se confond pas toujours avec la défense des droits des femmes. Cela ne l’empêche pas de défendre également les droits des femmes par une plainte à la Commission pour discrimination indirecte sur le calcul de leur salaire annuel moyen (S.A.M.) dans le secteur privé concernant le report au compte des années interrompues par un congé de maternité pour les naissances antérieures à 2012 (modification intervenue par la loi n°2010-1330 du 09.11.2010).

Pour les pouvoirs publics, il est grand temps de rompre avec la « politique de l’autruche » d’ouvrir des discussions avec la société civile au-delà des partenaires sociaux habituels afin de sortir de cette « guerre des sexes » archaïque, déconnectée des problématiques sociétales telles que le divorce.

Les droits familiaux ne pourront pas éternellement gonfler artificiellement les pensions perçues par les femmes si les véritables causes ne sont pas sérieusement évaluées et combattues, ne serait-ce que sur le poids du temps partiel qui fausse toute comparaison rationnelle et les données statistiques fournies par les organismes officiels.

Les gouvernements Fillon et AYRAULT se sont fourvoyés pendant plus d’une dizaine d’années. Le nouveau gouvernement VALS est aujourd’hui acculé par l’impact de cette condamnation. C’est à lui-seul qu’il incombe d’engager les réformes avec méthode et concertation, comme le réclame le COLLECTIF EGALITE RETRAITE depuis l’élection du président HOLLANDE.

CONTACTS :

COLLECTIF EGALITE RETRAITE-Mr et Mme COLLET : Blog : http://egalite.blog.free.fr/index.php 06.51.02.87.05 5collet@free.fr

Maître Bertrand MADIGNIER, Avocat au Barreau de LYON Tel : 04.78.26.42.02 / Fax : 04.72.81.88.62 Mail : bmadignier@mo-avocats.fr www.mo-avocats.fr (voir Dossiers : « Retraite fonctionnaires » et « Retraite régime général – Majorations pour enfants »).